Chikungunya en Cuba : propagation rapide et défis sanitaires dans un contexte économique fragile
Propagation rapide du chikungunya à Cuba et impacts socioéconomiques
Apparu en juillet dans une province de l’ouest de Cuba, le chikungunya s’est propagé ces dernières semaines à travers l’île, alimentant une hausse des cas dans un contexte de grave crise économique marquée par des pénuries de médicaments et de nourriture.
Situation sanitaire et chiffres clés
Selon le ministère de la Santé et l’épidémiologie, l’épidémie, initialement signalée dans la province de Matanzas, s’est étendue à quinze provinces, et des foyers de dengue et d’oropouche ont été recensés parallèlement. Le responsable Francisco Duran a indiqué que plus de 47 000 Cubains avaient reçu un diagnostic cette semaine, soit le double de la précédente. Jeudi, 627 nouveaux cas ou cas suspects ont été signalés, chiffre qui ne reflète toutefois pas la gravité réelle de l’épidémie car il ne recense que les personnes ayant consulté un médecin.
En début de semaine, le ministère estimait qu’environ 30 % des 9,7 millions de Cubains avaient été exposés au chikungunya ou à la dengue pendant cette épidémie.
Vivre avec l’épidémie dans les quartiers pauvres
Dans le quartier Jesus Maria, La Havane, Pilar Alcantara, âgée de 81 ans et vivant seule, décrit des douleurs dans tout le corps et une incapacité à marcher librement. «J’ai mal partout» et «je ne peux pas marcher», déplore-t-elle depuis son canapé où elle est alitée depuis plusieurs jours. Dans le même pâté de maisons, d’autres habitants touchés par le virus témoignent encore de séquelles, notamment des douleurs articulaires.
Des habitants comme Eva Cristina Quiroga, 74 ans, constatent les mesures de lutte contre les moustiques et indiquent que tout le monde dans leur entourage aurait été exposé au virus dans leur immeuble, où des fumigations ont été menées pour la première fois.
Facteurs aggravants et contexte économique
La gravité de l’épidémie se déploie dans une île déjà fragilisée par une grave crise économique, marquée par des pénuries de carburant et de devises qui affectent les services publics et les actions de prévention comme la fumigation. Les coupures d’électricité et le manque de nourriture compliquent la gestion de l’infection, qui peut provoquer une forte fièvre pendant plusieurs jours.
Dans l’ouest de l’île, touché par l’ouragan Melissa il y a trois semaines, la situation est d’autant plus difficile : selon l’ONU, plus de 642 centres de santé ont été endommagés.
Évolution et perception de l’épidémie
Historiquement, Cuba a subi des épidémies de dengue; le chikungunya est une maladie nouvelle sur l’île, arrivée en 2014 dans le cadre d’épidémies régionales. Si, autrefois, un foyer localisé à Santiago de Cuba avait été rapidement maîtrisé, cette fois l’épidémie est jugée hors de contrôle en raison notamment «de l’absence d’hygiène, des déchets accumulés et de l’eau stagnante» stockée dans des citernes pour pallier le déficit d’eau courante, estimé toucher jusqu’à trois millions de Cubains cette année.
À ce jour, aucun décès n’a été officiellement enregistré.
Impact global
L’épidémie fragilise davantage une économie cubaine déjà fragilisée par l’émigration et une faible productivité, et souligne les défis sanitaires dans un contexte de ressources limitées.